Homélie du 3e dimanche de l’Avent 2022
« Oui, je vous le dis, et bien plus qu’un prophète. »
Nos vies sont des écheveaux, notre monde est un écheveau d’écheveaux. Pour y voir plus clair, pour savoir vers où nous diriger, pour leur donner du sens, nous avons soif d’une parole. Quelqu’un qui nous comprenne, qui nous éclaire et nous inspire. Ce qu’on appelle un prophète. Ainsi, quand Jean le Baptiste apparaît au désert, beaucoup se tournent vers lui, vont le voir et l’écouter. Jésus le souligne : c’est un prophète qu’ils sont allés voir. D’autres raisons peuvent faire que quelqu’un nous attire : qu’il soit un roseau agité par le vent ou un homme habillé de façon raffinée, nous nous tournons facilement vers l’un qui va dans le sens du vent ou l’autre dont les habits et la parole brillent. Pour autant, nous savons qu’ils ne nous aident pas, qu’ils n’apportent rien à nos vies car ils sont vides. Jean n’était donc ni roseau ni homme scintillant : il vivait au désert, habillé de poils de chameau ; sa parole était tranchante ; ceux qui sont allés le regarder et l’entendre allaient à un prophète.
Plus encore que sa simplicité de vie et la droiture de son propos, ce qui faisait de lui un prophète est raconté ici : il n’attirait pas à lui mais orientait vers un autre. Ses disciples étaient certainement attachés à lui, voici qu’il est en prison, sans doute aurait-il aimé les garder près de lui. Cependant, il les envoie poser à Jésus une question dont il connaît la réponse. « Es-tu celui qui doit venir ? » Il le sait bien puisque, plus tôt, il a désigné Jésus comme « l’Agneau de Dieu » ; se considérant indigne, il n’a accepté de le baptiser que sur l’insistance de Jésus et, ce faisant, il a vu l’Esprit Saint sous la forme d’une colombe tout en entendant la voix du Père : « Celui-ci est mon fils bien-aimé. »
Alors, s’il envoie ses disciples, c’est pour qu’eux sachent quel est celui qui doit venir, celui après lequel il n’est plus nécessaire d’attendre quiconque. Jean-Baptiste ne s’annonce pas lui-même, ses disciples ne le sont que pour qu’il les guide vers le Christ. Voilà le critère principal qui permet de reconnaître les prophètes : ils conduisent à un autre. Leur parole, inspirée par un autre, envoie vers cet autre. Jean est le plus souvent représenté le doigt pointé, il est porteur d’une parole qui le traverse pour qu’on le dépasse. Voilà le prophète. Amen.