
Homélie du 2e dimanche de l’Avent 2022
Jean-Baptiste est l’aurore annonciatrice du jour. Alors que nous désirons la venue du Seigneur, il dit : « Déjà la cognée se trouve à la racine des arbres » et encore « Il tient dans sa main la pelle à vanner ». Pourquoi le Christ miséricordieux, se présente-t-il avec ces images de purification ? Quel est ce feu où vont être jetés la paille et les arbres sans fruit ?
Lorsque la lumière se fait, ce sont nos aveuglements qui sont mis au défi et, en particulier, nos aveuglements sur nous-même. Sans doute pensons-nous nous connaître, pourtant l’expérience d’avoir voulu en éclairer d’autres sur eux-mêmes nous enseigne. Peut-être avons-nous connu un moment où, après avoir consulté des amis communs, après avoir prié, ayant pris le temps de la réflexion, nous sommes allé voir un autre pour lui dire ce qui nous semblait être une parole salutaire. Nous avions bien pensé qu’il ne nous accueillerait pas sans objection, mais nous n’avions pas imaginé que ce qui semblait évident lui était si invisible. Alors, parfois, cela lui est resté comme un point aveugle et nos paroles sont demeurées impuissantes comme si elles cherchaient à décrire les couleurs à un homme frappé de cécité. En nous écoutant, il craignait sans doute de se perdre tout entier quand nous voulions le rendre à lui-même. D’autres fois, l’autre a fini par voir un peu de ce que nous tâchions de lui révéler sur lui-même et, en acceptant la brûlure de nos mots, il a regardé dans le miroir que nous lui tendions. Alors, nous avons essayé d’être le plus délicat possible car nous sentions bien que nos paroles étaient incendie dans sa maison.
Cette expérience devant l’aveuglement de l’autre sur lui-même doit nous enseigner sur nos propres aveuglements. Selon toute vraisemblance, nous sommes nous aussi dans la même situation : la lumière nous manque pour connaître nos ténèbres. D’autres nous ont donné à comprendre qu’être éclairé sur soi-même c’était être passé au feu, il nous faudra donc aussi être incendié pour être sauvé. À l’heure où le soleil se lèvera, quand le Christ viendra, il portera dans ses mains la cognée et la pelle à vanner, sa lumière miséricordieuse sera exhaussement de notre beauté et brûlure de nos ténèbres. La colère de Dieu, c’est son amour lorsqu’il s’exerce sur notre mal : il consume ce qui doit mourir pour que vive en nous l’éternité.
S’y préparer, c’est accueillir cette réalité de notre aveuglement. Nous ne savons pas de quoi nous sommes aveugle dans notre vie et nous ne pouvons pas connaître le jour où nous serons éclairé. Dieu choisira donc l’heure mais c’est avec notre consentement que cette lumière se fera sur nous. S’y préparer, c’est aussi se rendre compte que nous passerons par un tremblement de terre intérieur, un effondrement de certaines de nos fondations pour être établi dans le Royaume. Il y a en nous une part qui veut la lumière comme son salut et l’autre qui la fuit comme sa perte, une part qui désire l’amour et l’autre qui craint la colère. Nous ne pourrons avoir l’un sans l’autre, nous serons tout entier à Dieu où nous le refuserons entièrement. C’est en nous exposant devant le Christ autant que nous le pouvons dès aujourd’hui et tout entier au jour de sa venue que nous serons sauvé. Amen.