Homélie du vendredi saint 

Après la mort de Jésus, il n’y a plus une parole. Son corps est encore livré à la lance du soldat et aux soins de ses disciples mais nul ne parle plus. La mort c’est le silence, ceux qui entourent le Christ se taisent et le dernier cri de Jésus résonne sans réponse. Bientôt, il sera enfoui dans le tombeau et nous n’aurons pas une explication tandis que nous accompagnerons Jésus au sépulcre. 

Comme on se tait en traversant un cimetière, comme on reste sans rien dire auprès du cercueil d’un ami, nous voulons nous approcher du corps de Jésus sans un mot. Nous voulons laisser le vide se faire sans chercher à le combler de nos paroles car elles sont sans poids devant la mort, elles sont faites de raccourcis, elles n’expliqueraient rien, elles ne feraient que poser un voile sur la réalité comme on roule la pierre sur le cadavre de Jésus tout en risquant d’étouffer la délicatesse de la voix du Père qui, seule rendra la vie. Nos phrases pourraient nous empêcher de l’entendre et la retenir de porter tout son fruit. Par sa mort, le Christ nous a précédés dans le silence, alors, nous essayons de l’y suivre.  

Dans ce silence, c’est de Marie que nous nous approchons. Elle porte le corps de son fils et bientôt le laisse derrière la pierre du tombeau. Nous voudrions la réconforter. Nous cherchons mais nous ne trouvons rien, nous n’avons que notre silence à lui offrir. Puisque Jésus nous l’a confiée, nous nous approchons sans un mot. Mais voilà que c’est elle qui nous offre sa présence et nous ouvre son cœur. Elle ne dit rien, elle n’a pas plus de mots que nous, pourtant, dans le silence et la nuit qui s’étendent, à travers sa douleur, elle nous partage une espérance qui ne donne aucune réponse, qui ne dit pas comment cela se fera, ni même ce qui se fera mais qui rayonne sur nous. Marie semble n’être plus qu’une blessure, elle est transpercée comme son fils, elle est si fragile et si nue ; dans sa douleur, elle a une foi toute pauvre en la parole de Dieu. En ces heures, elle est notre seule richesse et nous voulons rester près d’elle pour nous unir à elle dans le silence. Amen.