Chercher la vérité

Homélie de l’Epiphanie 2019

« Des mages venus d’Orient » 

Trouver la vérité est le fruit d’un long travail. Les mages venus jusqu’à la crèche en témoignent. Voilà des hommes qui ne se contentaient pas de leur quotidien et de leurs préconceptions. Savaient-ils seulement ce qu’ils cherchaient à tâtons dans la nuit ? Ils ne se sont pas résolus à écouter ceux qui leur disaient : « à quoi bon se poser des questions sans réponse ? » Ils se sont donc mis à l’écoute de la création, ils ont scruté les étoiles, ils ont cherché le message dont elles étaient porteuses en l’éclairant de leurs connaissances. Leur esprit était fait pour comprendre le sens de cette création mais ce sens ne se donne pas sans un sérieux combat. Il y a dans leur recherche quelque chose de long et de pénible, d’autant qu’elle ne portait en elle aucune garantie de résultat. Ils acceptent de partir, de risquer leur vie sur les chemins pour adorer ce roi qu’ils ne sont pas sûrs de trouver. 

Cette quête les mène à Jérusalem. L’étoile les avait renseignés – on ne sait comment – sur la naissance d’un roi des Juifs, ils viennent donc naturellement à la capitale de la Judée. L’étoile semble avoir disparu à ce moment-là. C’est pour eux la nuit profonde, cet instant où apparemment tout a été dépensé en pure perte. On a brûlé ses vaisseaux et l’on n’a pas rejoint le port. On a quitté sa patrie, on se trouve au milieu de la mer sans aucune terre à l’horizon et toutes les raisons que l’on avait de se mettre en quête nous échappent. La vie paraît avoir encore moins de sens qu’au départ. 

À ce moment, se passe la chose la plus étonnante qui soit : les mages s’en remettent à celui qui apparaîtra comme leur exact opposé. L’étoile les abandonne entre les mains d’un homme qui se prétend roi et qui vit de mensonges, d’un homme à qui la vérité importe peu, d’un homme pour qui seul compte de se maintenir en place, d’un homme qui veut faire céder l’univers à son désir, alors qu’eux étaient prêts à s’offrir pour que l’univers leur livre son sens. Hérode est là comme le signe que tout concourt à la quête de ceux qui veulent faire la vérité. Hérode, par les scribes qu’il convoque, se fait malgré lui l’écho de la révélation de Dieu présente dans l’Écriture. Il aura été indispensable sur la route des mages. Ceux-ci auraient pu mépriser les connaissances d’une cour corrompue mais, bien qu’elle leur parvienne par des serviteurs indignes, ils se mettent à l’écoute de la parole de Dieu. Leur quête avait commencé en levant la tête vers les étoiles, elle se continue par le bas en écoutant une révélation qui leur est transmise par la lie de l’humanité.  

En quittant le palais d’Hérode, les mages semblent sortir des ténèbres et retrouvent l’étoile. Celle-ci n’est plus aussi énigmatique qu’à leur départ. Il leur avait fallu les ressources de leur science pour savoir que son apparition désignait la naissance d’un roi des Juifs ; maintenant qu’ils lui ont été fidèles lorsqu’elle semblait se dérober, elle leur indique clairement la route en se déplaçant jusqu’à la crèche. Elle les mène jusqu’à une personne. Ils découvrent alors que la sagesse est quelqu’un. La réponse à leurs questions est un enfant-Dieu. Le sens de l’univers ne se donne pas dans les mots, mais par-delà ceux-ci en celui vers qui toutes les paroles orientent : le Verbe incarné en qui tout s’éclaire. Ils ne seraient jamais parvenus là sans mettre à profit les ressources de leur esprit mais voici que leurs esprits s’ouvrent et c’est leur être tout entier qu’ils mettent à genoux pour adorer le roi des rois et se laisser illuminer par lui. Amen.