Homélie du 2ème dimanche du temps ordinaire
« Nous avons trouvé le Messie »
Il est de rares moments où nous touchons du doigt ce qui est l’essentiel de notre existence. Si nous passons en esprit notre semaine au tamis de la mort, si nous laissons remonter à la surface ce qui restera au ciel de nos actions des huit jours passés, des paroles que nous avons prononcées, de ce que nous avons vécu, nous retrouvons peut-être quelques pépites disséminées dans le flot de nos activités. C’est une rencontre, un regard d’amitié, une parole d’amour, une découverte lumineuse, un moment de prière fervent… Elles sont si légères dans la tempête qu’est notre vie, pourtant elles peuvent seules lui donner sens. Elles sont comme des étoiles qui nous montrent le chemin. Si nous les suivons, si nous écoutons l’appel qu’elles font retentir en nos âmes, nous entendons qu’elles sont d’autres Jean-Baptiste qui nous tournent vers le Christ en disant : « voici l’Agneau de Dieu ». Elles nous orientent vers celui sans lequel nous n’existerions pas, celui qui sait le sens de notre vie.
C’est le cri d’André à son frère : « Nous avons trouvé le Messie ». André a écouté l’indication de Jean-Baptiste : « Voici l’Agneau de Dieu », il a suivi cet énigmatique panneau indicateur, il a trouvé Jésus et l’a choisi pour maître. Il en ressort bouleversé. Sa vie était une quête, elle a découvert son trésor. André vit ainsi une véritable révolution copernicienne. En effet, s’il n’y a qu’un seul astre au centre de notre système, il nous reste cependant à le reconnaître. Avant Copernic, le calcul de trajectoire des planètes que l’on croyait se produire autour de la Terre était horriblement compliqué. Quand il choisit de mettre le soleil au cœur de son système – c’est-à-dire de correspondre à la réalité – Copernic simplifie tous les calculs, si bien que l’on se demandera longtemps pourquoi cette idée a mis tant de temps à s’imposer et l’on fera encore mille fois l’histoire des raisons qui ont maintenu l’Occident dans l’aveuglement à ce sujet.
Il n’en va pourtant pas autrement de notre relation à Dieu. Nous nous compliquons la vie à ne pas vouloir voir sa place au début, au centre et à la fin de nos vies. Bien que Dieu nous ait créés, qu’il soit notre soleil, nous mettons souvent longtemps avant de le reconnaître et d’en tirer les conséquences pratiques.
Pourtant, quand on a trouvé le Christ, c’est comme si tout se mettait à sa juste place. Les combats ne cessent pas, les journées ne sont pas plus faciles, mais elles sont plus simples car elles ont désormais leur orientation en Jésus. C’est lui qui les emplit alors de sens. « Tu es Simon, fils de Jean, tu t’appelleras Kephas ». Au moment où, à la suite de son frère André, Pierre – puisque c’est ce que signifie le grec Képhas – fait sa révolution copernicienne, Jésus lui dit d’où il vient – fils de Jean – et où il va – « tu t’appelleras Kephas ». En découvrant le Christ et sa lumière, Pierre est révélé à lui-même. Amen.