Homélie du 3e dimanche de l’Avent
« Moi, je vous baptise dans l’eau »
Le baptême de Jean ne procurait pas le salut. Une plongée dans l’eau avec le désir de changer de vie, qu’est-ce que cela pouvait faire ? Les pharisiens lui demandent d’ailleurs pourquoi il baptise puisqu’il n’est ni le Prophète ni le Christ. Si ce n’est pas Dieu qui baptise par ses mains, à quoi bon ? Nos propres forces ne nous mèneront pas au ciel. Comment un homme pourrait-il atteindre le ciel inaccessible ?
Un temps, nous avons pu imaginer que cela était possible, qu’à force d’efforts nous y arriverions. Nous avons même pu croire quelques temps que nous parvenions de nous-mêmes à mener une vie droite mais nous en sommes revenus. Nos espoirs ont brûlé, la première épreuve nous a trouvés mal préparés et nos illusions sur nous-mêmes sont tombées. Pourrons-nous faire autre chose que de mendier le salut en tendant les mains vers le ciel ?
Jean est ce mendiant, il n’a rien, il n’est rien par lui-même, mais il n’oublie pas de tendre la main : il baptise d’eau. De ce pauvre baptême, incapable de changer le cours de l’histoire, naîtra pourtant le baptême dans l’Esprit Saint. Le baptême de Jean est devenu par Jésus le baptême que nous connaissons, le sacrement que nous avons reçu et qui nous donne le salut. Jésus a repris la manière de faire de son cousin ou plutôt il l’a remplie car le baptême de Jean était une main ouverte. C’est un vide que le Seigneur est venu combler en se saisissant de l’humble geste du Baptiste pour en faire le lit du fleuve qui donne le salut à tous.
Jean « n’était pas la lumière mais il était là pour rendre témoignage à la lumière ». Il est le type achevé de l’homme qui se laisse combler : il diminue pour que Dieu grandisse, il s’efface en envoyant ses disciples vers l’Agneau de Dieu, il se présente comme « je ne suis pas » pour mieux laisser transparaître celui qui est.
Quant à nous, nous ressemblons à ces enfants qui demandent à faire le ménage et derrière lesquels il faut repasser discrètement pour nettoyer vraiment la maison tout en évitant de les vexer. Ils peuvent finir par croire que c’est eux qui lavent aussi bien. Sans nous le faire remarquer, Dieu reçoit délicatement l’offrande de nos actes malhabiles et les remplit de sa grâce ; mais nous sommes perdus si nous imaginons trop longtemps que le bien vient de nous. Nous ne sommes que de la glaise dont le Seigneur veut faire le lit d’une rivière immense. Plus il y aura en nous d’espace, plus nous serons comblés ; plus il y aura en nous de fissures laissant place au Seigneur, plus nous serons parfaits et achevés. Le fleuve creuse son lit, il commence par s’infiltrer dans la première anfractuosité pour l’élargir en la remplissant et en lui donnant forme. Si nous voulons être quelque chose, nous présenterons une faille par lequel le Seigneur puisse entrer, nous offrirons notre pauvreté au Seigneur. Nous n’avons rien d’autre à lui donner et c’est par là qu’il veut passer. La crèche est encore vide ces jours-ci, demandons à Jésus d’en être le reflet pour qu’il trouve la place de venir habiter en nous. Amen