En marchant sur la mer

IMG_8715_DxO - copieHomélie du 19ème dimanche du temps ordinaire

« Confiance ! C’est moi, n’ayez plus peur ! »

Dieu seul est grand, Dieu est l’infiniment grand. Alors qu’Élie l’attendait, vinrent ouragan, tremblement de terre et feu et Dieu n’était dans aucun d’entre eux pour une simple raison : c’est qu’il était bien plus grand qu’eux. On ne mesure pas la transcendance de Dieu mais, pour pouvoir y ouvrir notre esprit et notre cœur, il faut revenir à nos expériences terrestres. Toutes choses qui nous ont permis de nous rendre compte qu’une puissance infiniment plus grande que nous régnait sur cet univers : la majesté de l’océan, la splendeur silencieuse des montagnes, la force d’un orage, la profondeur d’un ciel étoilé, Dieu n’est en aucune d’entre elles ; plus puissant, plus splendide, plus grand, il faut le chercher bien plus haut et cela nous donne une toute petite idée de la distance qui nous sépare de lui.

Il faut jauger cette distance et se rendre compte qu’elle est incommensurable pour commencer à entrevoir ce que signifie l’incarnation du Christ. L’étoile pourrait se faire luciole, l’océan goutte d’eau et la tempête boule à neige qu’ils n’auraient pas traversé une distance aussi grande que le Fils de Dieu ; car, en se faisant homme, le Christ ne fait pas que rapetisser, il prend une nature tout autre que la sienne. Il est le créateur, il devient le créé ; il est éternel, il devient mortel ; il est Dieu, il se fait homme. Jésus traverse l’océan infranchissable qui nous séparait de lui ; sa marche sur la mer en est le signe et l’image.

Cependant, en devenant l’un de nous, il ne cesse pas d’être ce qu’il était. En Jésus se trouvent réunies la majesté divine et la fragilité de notre chair. Voilé sous l’humble humanité de Jésus se trouve le Tout-Puissant lui-même. Au jour où ils prirent conscience de ce mystère, les apôtres tremblèrent, ils désirèrent être près de lui tout en craignant de s’en approcher, comme on contemple dans un nourrisson la merveille d’une vie encore toute cachée et pourtant déjà pleinement là, une existence nouvelle et désormais éternelle dans un corps si petit et si faible. Alors, on désire le prendre dans ses bras et l’on craint en même temps de le blesser.

Le mystère contemplé par Élie puis par les apôtres est celui-ci : le Tout-Puissant s’approche de nous tel que nous sommes capables de l’accueillir : comme le souffle d’une brise légère, comme un nourrisson, comme un être fragile. Nous qui sommes blessés avons besoin de rencontrer un Dieu qui puisse nous toucher pour nous guérir.

« Ordonne-moi de venir vers toi » s’écrie alors Pierre comprenant que le Seigneur est venu vers nous pour nous attirer à lui. Jésus s’est fait homme pour nous rendre divins, il a traversé jusqu’à nous pour nous entraîner dans son retour vers le Père. Cette splendeur contemplée appelle notre âme à la grandeur pour laquelle elle est faite. Quand nous en prenons conscience, nous nous sentons si petits et incapables que nous pouvons être saisis de vertige. C’est Pierre qui prend peur devant la puissance des éléments. Moi, si petit, je régnerais comme Dieu sur le vent et les eaux, sur la création elle-même ! Voilà pourtant la promesse que nous avons reçue au jour de notre baptême. Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit, nous sommes désormais les enfants bien-aimés du Père. Saints, majestueux, grands, de la sainteté, la majesté et la grandeur divines. Amen.