L’Évangile en alexandrins

ob_a31e1f_cergy-octobre-15-axe-majeur-colonnesHomélie du 3ème dimanche du temps ordinaire

« Venez à ma suite et je vous ferai pêcheurs d’hommes »

L’Évangile d’aujourd’hui manifeste combien l’appel des Douze est fondamental dans le ministère de Jésus. Alors qu’il commence à proclamer la Bonne Nouvelle, il choisit immédiatement des apôtres pour qu’ils le suivent. Ce n’est pas une décision annexe, secondaire ou supplémentaire. Pour Jésus, annoncer le Royaume, cela suppose d’appeler des apôtres.

En effet, il n’est pas venu simplement montrer le chemin, il est le chemin. Ses paroles indiquent un idéal, elles montrent l’objectif mais où est la route, comment se convertir, par où passer pour marcher vers cet idéal ? Par Jésus lui-même, aussi n’a-t-il pas voulu laisser simplement des paroles mais appeler des apôtres, c’est-à-dire des êtres qui ont vécu avec lui. En suivant Jésus durant trois ans, ils ont fait plus que retenir ses enseignements, ils ont été changés, convertis ; ils ont parcouru ce chemin. En l’accompagnant au long de sa vie publique, dans ses succès comme dans ses déboires, en se laissant toucher par la profondeur de sa parole et en percevant sa fatigue au soir, en se réjouissant des œuvres qu’il accomplissait et en craignant les menaces qui pesaient sur lui, en le trahissant au jour de la croix et en recevant le pardon de sa résurrection, les apôtres ont mesuré leur faiblesse tout autant que la puissance que Dieu pouvait mettre à l’œuvre en eux.

Au jour de son Ascension, Jésus n’a rien laissé d’autre sur la terre que ces douze-là. Il n’a rien écrit, il n’a fait aucune réalisation qui puisse se conserver sous verre et qui nous resterait aujourd’hui ; sa seule œuvre est inscrite dans le cœur de ses compagnons. Elle y a été gravée lentement mais sûrement par l’influence que seule peut exercer une présence longue et continue. En réalité, les apôtres ont été pétris par ces trois années, ce sont elles qui les ont faits ce qu’ils sont.

C’est pourquoi, à la fin de l’Évangile, Jésus leur énonce leur mission comme en écho de ses débuts à lui : Allez, annoncez, faites des disciples, baptisez. Les apôtres ne se contenteront pas de répandre des maximes de Jésus comme le facteur transmet du courrier, ils transmettront le Verbe lui-même et ils donneront à d’autres de brûler de cette parole qui est devenue leur vie. Ainsi leur conversion deviendra-t-elle contagieuse. Ils inviteront d’autres à vivre avec eux d’un compagnonnage similaire à celui qu’ils ont vécu avec Jésus afin qu’ils soient eux aussi changés et « faits disciples », car c’est par la vie avec les chrétiens qu’on devient chrétien.

L’Église est cette union de personnes qui nous permettent d’être changés, de recevoir cette vie de Jésus transmise par les apôtres jusqu’à nous. Elle nous transmet bien sûr les paroles du Christ et les sacrements et elle le fait en nous donnant une famille et parmi cette famille, des personnes qui ont été converties, qui se sont laissé envahir par la grâce et dont l’influence agit sur nous lorsque nous nous en approchons, que nous les côtoyons et recherchons leur présence. C’est près de ces tuteurs-là que les paroles et les sacrements portent du fruit en nous et nous donnent le salut. Amen