Homélie du 1er dimanche de l’Avent
C’est à l’heure où vous n’y penserez pas que le fils de l’homme viendra.
Pas moyen de s’organiser, il s’agit de s’abandonner. Le Christ nous l’a clairement dit : il reviendra dans la gloire. Cela est sûr, aussi sûr que la date et l’heure en sont inconnues. De ce point de vue, son retour est semblable à une autre réalité tout aussi certaine de nos existences : la mort. Le péché l’avait fait entrer dans le monde mais le Seigneur n’a pas permis que nous en connaissions le moment. Cette ignorance est salutaire, elle nous évite des calculs qui se révéleraient forcément faux. Il n’y a pas moyen d’avoir un plan de carrière de sainteté, c’est maintenant ou jamais, c’est tout ou c’est rien.
Ce temps de l’avent est celui où, pour pouvoir accueillir le Christ à l’heure de sa venue, nous nous remettons devant cette vérité : tout ne continuera pas éternellement de la même manière. La mort viendra mettre un terme à notre vie, le retour du Christ achèvera l’histoire du monde. Nous ne vivons donc pas comme si la terre devait tourner à jamais de la même manière. Un jour il n’y aura plus d’Avent ni de fête de Noël et nous entrerons dans la joie du Royaume qui sera le banquet éternel des noces de l’Agneau. Ce jour peut être aujourd’hui.
Ce peut être aujourd’hui ou dans mille ans car le Seigneur qui veut notre bonheur ne nous informe pas des temps et des moments. Nous sommes déjà si enclins à nous dire : « j’ai bien le temps » et nous faisons comme si notre salut était un item supplémentaire de la liste de choses à faire avant de mourir entre la visite de l’Écosse, l’apprentissage du russe et le saut à l’élastique. Ce faisant, nous oublions que la poursuite de la sainteté est notre bonheur.
Jésus énonce ce qui occupe habituellement une vie humaine : on mange, on boit, on se marie. C’était le cas à l’époque de Noé, c’est encore le cas aujourd’hui. Pourtant, toutes ces réalités ne peuvent nous donner le bonheur que si elles s’inscrivent dans une finalité plus haute. La nourriture et la boisson, le mariage ne nous combleront que s’ils sont déjà pour nous l’anticipation du festin des noces de l’Agneau. Jésus nous parle ici de toutes ces choses que nous vivons et qui sont bonnes mais ne peuvent nous rendre heureux que si nous y joignons la bonté de notre cœur. Il ne suffit pas de faire bien, encore faut-il aimer.
« Deux hommes seront aux champs : l’un sera pris, l’autre laissé ». De l’extérieur, l’observateur voit deux personnes agir de même mais Dieu, qui voit le fond des cœurs, sait que l’activité de l’un porte en lui un fruit qui demeure à jamais, tandis que celle de l’autre l’entraîne vers le néant. Mangeons-nous pour réparer nos forces et mieux aimer ? Buvons-nous pour partager avec d’autres le bonheur de vivre ? Nous marions-nous enfin pour nous donner et porter la vie ? Qu’est-ce qui nous habite et nous décide à agir ? De la réponse à cette question, dépend notre salut éternel.
En cet avent, nous ne prendrons pas de grande résolutions extérieures mais nous appliquerons notre cœur à accomplir avec bonté nos activités quotidiennes, les petites et les grandes, à mettre l’amour de Dieu et des autres dans notre travail, nos services et notre famille. Nous espérerons son retour comme des enfants attendent le retour de leur père le soir et, le cœur battant, s’appliquent à faire leur travail, à mettre la table, à prendre leur bain, afin qu’il les trouve prêts et heureux de lui sauter dans les bras. Amen.