
Homélie de Noël – Messe des familles
Paix sur la terre aux hommes, qu’il aime !
Les enfants connaissent le
bonheur d’être attendu et la joie plus grande encore de savoir que quelqu’un
est venu les chercher. Cette joie est à son comble lorsque l’on découvre que ce n’est pas la nounou, pourtant on l’aime bien, ce n’est pas
la grand-mère, pourtant on ne doute pas de son amour, mais c’est maman, c’est
papa. À la sortie de l’école, à la porte du car, au bout du quai de la gare,
c’est ce trop-plein qui monte du cœur avec cette exclamation intérieure :
« ils sont venus me chercher ! » Ce petit rien apparaît alors
comme la plus grande des preuves d’amour car ils ne se sont pas contenté de
m’envoyer un signe de leur affection – comme la carte postale reçue en
milieu de séjour ou le pique-nique préparé avec délicatesse ; ils n’ont
pas non plus dépêché une personne pour me ramener à la maison – elle m’aurait à
la fois réjoui, en symbolisant leur attention pour moi, et déçu car elle ne
peut me donner ce qu’ils sont à mes yeux ; ils sont là et c’est, sans
intermédiaire ni succédané, leur présence même qu’ils m’offrent. Rien ne peut
les remplacer.
Cette joie est celle de Noël.
Dieu est là, présent. Jusque là, il n’avait pas manqué de nous dire son amour :
par la création tout d’abord, cette œuvre qui resplendit de sa bonté, puis par sa
révélation au peuple d’Israël. En effet, le soleil et la lune, la beauté d’un
soir d’été et la tendre délicatesse de la neige, l’eau donnant vie à nos corps
et le pain les fortifiant, l’affection de nos proches et la force des liens
familiaux nous manifestent tous l’amour de celui qui nous les a donnés. Comme
ces preuves de tendresse n’atteignaient pas toujours nos cœurs, il nous a aussi
dit explicitement son amour infini pour l’homme. De même que des parents
appellent leurs enfants partis loin du foyer, leur envoient des lettres et leur
écrivent des textos, le Seigneur n’a eu de cesse de nous parler. La promesse
faite à Abraham, l’Alliance établie par Moïse, la parole inspirée des prophètes
sont autant de mots d’amour.
Et voici qu’il a voulu faire
plus encore : nous être présent. Aujourd’hui,
vous est né un Sauveur. L’ange annonce aux bergers quel est l’enfant qui
vient de naître et une multitude ajoute comme en écho : Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre aux hommes
qu’il aime. Celui qui nous aime est notre paix. Cet enfant n’est pas
simplement une preuve d’amour de Dieu parmi d’autres, il est la plus grande de
ces preuves car c’est lui-même venu parmi nous. Laissons donc monter de nos
cœurs ce cri : « Il est venu me chercher ! » et, devant
lui, déposons avec confiance nos fardeaux comme on le fait entre les bras d’une
mère et au creux de l’oreille d’un père. Le bonheur de cette fête est celui de
se savoir aimé. Il est là, présent durant cette messe ; alors, dans la
paix de cette nuit, plongeons dans cet amour pour lui confier nos vies, lui
offrir nos peines, être présents à son amour et lui dire le nôtre. Tels les
bergers qui gardaient les moutons dans le froid et les ténèbres, venons à la
chaleur lumineuse de la crèche et auprès de l’enfant nouveau-né, soyons comme
des enfants prêts à tout recevoir de leur Père aimant. Là, demandons-lui de
connaître l’ampleur de son amour : en être persuadés dans notre esprit ne
suffit pas, il faut encore qu’il descende en nos cœurs et que nous soyons
envahis tout entiers de la réalité de sa présence aimante auprès de nous.
Cette nuit de paix peut alors être
le cadeau de Noël qu’il a préparé pour nous. Bien sûr, nous repartirons
affronter les multiples épreuves de la vie. Toutefois, ayant profité de la
douceur de l’Enfant Jésus et forts de l’assurance de son amour, nous y serons
guidés par une lumière nouvelle et resplendissante. Plus rien n’est pareil
quand nous savons que nous sommes aimés, d’autant que cet amour est si grand
qu’il a franchi toutes les distances pour venir nous chercher et être avec
nous. Depuis que Dieu s’est fait homme et qu’il est né parmi nous, rien n’est
trop loin de lui, aucune de nos nuits n’éteindra cette flamme, il pourra être
avec nous dans chacune de nos épreuves si, ce soir, nous lui ouvrons la porte
de nos cœurs en lui disant simplement : Jésus, je t’aime, Jésus, je sais que tu m’aimes. Amen.
Saint-Michel – 24 décembre 2015