No limit

Homélie du 6ème
dimanche de Pâques

« C’est lui qui nous a
aimés » 

Nous avons besoin d’être
aimés pour aimer. Nos efforts sont toujours limités et nous touchons bien vite
le fond de nos réserves. Nous pouvons prendre toutes les résolutions du monde,
trop d’agression nous rendra agressifs, trop de violence nous rendra violents,
trop de blessures nous rendront blessants. Nous n’aimons jamais qu’à la mesure
de l’amour que nous recevons : c’est un paradoxe car le propre de l’amour
c’est d’être gratuit. L’amour n’est pas un échange commercial dans lequel j’espère
retirer autant que je mets, il est le don que je fais de moi-même sans espérer
de retour. Nous sommes incapables d’aimer sans recevoir de l’amour et pourtant
il n’y pas d’autres manière d’aimer. 

Voici en quoi consiste l’amour : ce n’est pas
nous qui avons aimé Dieu, mais c’est lui qui nous a aimés.
Seul le Christ aime sans mesure. Sur cette croix, ce
n’est pas sa souffrance qui nous sauve mais son amour. Le mal est allé chercher
très loin et il a puisé abondamment dans le cœur du Christ pour le vider de
tout amour ; en le frappant, en l’injuriant, en le clouant, en le tuant, obtenir
ce qu’il finit toujours par obtenir de nous quand il nous attaque : la
violence qui jaillit quand nous sommes à sec de tout amour. Or, il n’a jamais
touché cette limite là, au contraire, il a été inondé et noyé par la vie et
l’amour qui ont jailli du côté transpercé. Jésus devient pour tous ceux qui
viennent puiser à cette eau, la source de l’amour et du salut. C’est ce que martèlent
les textes de ce jour : l’amour
vient de Dieu ; ce n’est pas vous qui m’avez choisi, c’est moi qui vous ai
choisis ; comme le Père m’a aimé, moi aussi, je vous ai aimés.
Le
commandement que Jésus donne à ses apôtres : Aimez-vous les uns les autres prend son sens dans le comme je vous ai aimés. Ce commandement,
c’est de puiser en Jésus l’amour des uns pour les autres.

Tout cela est d’une
simplicité proprement évangélique : Jésus est une source inépuisable
d’amour, nous recevons l’amour de Jésus et nous pouvons alors aimer jusqu’à nos
ennemis. Comment se fait-il que cela nous semble trop souvent de bien belles
phrases de curé si loin de notre réalité ? Ne savons-nous pas ce que
cela signifie ou au moins ce que cela pourrait signifier ? Quand nous
étions las et fourbus par les coups reçus, n’avons nous jamais cherché les bras
d’un ami ou d’un amour pour y retrouver la force d’aller de l’avant, de sourire
et d’aimer ? Et quand nous soupirions après cet amour-là, avons-nous
cherché plus haut ? Osons-nous y croire ? Jésus ne pourra nous
combler de son amour que si nous nous tournons vers lui.

En lisant la vie des saints,
nous découvrons la prière de Sainte Catherine de Sienne qui était une  communion d’amour avec Jésus, la messe de
Saint Philippe Néri qui était une extase quotidienne et l’union permanente à
Jésus de Marthe Robin. Puisque Jésus nous dit à nous que nous sommes ses amis,
soyons sûrs qu’il veut aussi nous combler de ses dons. Tournons-nous vers lui
pour les recevoir. Dans nos détresses, quand nous voudrions aimer davantage et
aimer mieux, quand les bras de ceux sur qui nous pensions pouvoir compter se dérobent,
quand nous nous sentons tellement seuls et tellement vides, tournons-nous vers
le Christ, reposons-nous sur son cœur, puisons à cette source l’eau qui
désaltère vraiment. Amen.