
Homélie du 5ème
dimanche de carême
Messe de première
communion
Dans
l’évangile d’aujourd’hui, certains font cette demande : « Nous
voudrions voir Jésus ». C’est aussi votre demande en ce jour de votre
première communion. Vous êtes venus pour Jésus et qu’allez-vous voir ? Un
rond de pain plat, une hostie. Vous voulez voir Jésus et Jésus se cache. La
semaine dernière, au cours de la retraite de première communion, certains ont
voulu faire un cache-cache. Quel drôle de jeu, on se cache, mais
pourquoi ? Pour être cherché. De même, si Jésus se cache, s’il se voile
derrière les apparences d’un pain ordinaire et d’un peu de vin, c’est pour que
nous le cherchions. Mais comment le chercher ? Il ne s’agit pas de trouver
le lieu où il est, puisque nous savons qu’il est sur l’autel, dans le
tabernacle. Nous croyons qu’il est là. Il ne s’agit pas de le chercher avec les
yeux de notre corps mais avec les yeux de notre cœur. Pour se servir de ces
yeux-là, il est souvent utile de fermer les autres. De s’arrêter, de s’asseoir
devant le tabernacle, devant le Seigneur, comme vous l’avez fait à chaque
réunion de préparation. Pas facile de trouver Jésus, pas facile de se
concentrer quand on est à l’adoration, c’est comme un cache-cache intérieur. Ce
ne sont pas nos pieds qui marchent pour le trouver, mais les pieds de notre
cœur qui partent à sa recherche alors que nous arrêtons de bouger les jambes et
les bras. Nous fermons les paupières et les yeux de notre cœur scrutent la
profondeur des choses. Notre bouche se tait et nous pouvons dire au fond
de nous-même : « Je crois que tu es là Seigneur, donne-moi de te
trouver ».
Dans Le Petit Prince, il y a ce moment où le héros rencontre un marchand
de pilules perfectionnées qui apaisent la soif. Il suffit d’en prendre une par
semaine et on n’a plus besoin de boire, on économise ainsi cinquante-trois
minutes par semaine. Mais que peut-on faire de ce temps économisé ? Le
petit Prince répond lui-même à cette question : « Moi, si j’avais
cinquante-trois minutes à dépenser, je marcherais tout doucement vers une
fontaine ». Quand j’étais en primaire, je partais souvent à la montagne
avec mon grand-père, j’aimais beaucoup arriver au sommet, la beauté du paysage
tenait pour beaucoup au fait d’avoir marché pendant des heures pour
l’atteindre. Ces heures de montée, sous le soleil, avaient préparé mes yeux à
regarder en me faisant désirer voir. Là-haut, j’étais prêt à contempler la
beauté de la création. La prière, c’est un petit peu semblable, il y a souvent
un effort, mais, par elle, Jésus prépare nos cœurs à le voir. Ces
cinquante-trois minutes que nous passons à la messe le dimanche nous font
marcher jusqu’à une source où Jésus peut vraiment remplir notre cœur de son eau
vive, jusqu’à une montagne où nous pouvons contempler la splendeur de son amour
pour nous.
Aujourd’hui, Jésus qui est caché
dans le tabernacle va venir se cacher dans votre cœur. Comme un grain de blé
qui tombe en terre s’y cache pour germer, grandir et porter du fruit, Jésus
vient en vous pour y grandir avec vous. Vous ne verrez pas toujours qu’il est
là, comme on ne voit pas le grain semé. Mais, si vous l’arrosez en communiant
régulièrement, si vous retirez les mauvaises herbes en vous confessant, si vous
bêchez autour en essayant d’aimer ceux que vous rencontrez, alors cette
présence, cette toute petite et faible présence va grandir et changer vos vies.
Pour commencer à la laissez grandir en vous, vous avez préparé vos cœurs, comme
on prépare un champ avant d’y semer le grain. Vous allez encore vous préparer
en ces quelques minutes qui restent avant de communier, par votre attention et par
votre prière. Puis, une fois que vous l’aurez reçu, prenez le temps. Fermez les
yeux, laissez le Seigneur parler à votre cœur, vous ne verrez rien avec vos
yeux de chair, vous n’entendrez pas de mot, mais si vous laissez le silence
s’installer en vous, le Seigneur vous envahira complètement de son amour et
vous emplira de sa force. Amen.
Saint-Michel – 22 mars
2015