
Homélie du 4ème dimanche de carême
Celui qui fait la vérité vient à la lumière
Nousapprochons généralement de la confession avec crainte si bien que nous en
arrivons parfois à fuir ce remède à notre mal. Cela tient pour une grande part
à la peur que nous avons d’être accablés par notre péché : mieux vaut
l’oublier que risquer qu’il nous écrase, mieux vaut ce confort précaire dans
lequel nous nous sommes arrangés avec lui que l’inconfort inconnu et nouveau d’un hypothétique pardon, et nous ressemblons à ces enfants qui cachent leur carie de peur de devoir aller
chez le dentiste.
Cela
peut aller jusqu’à l’abcès car tant qu’il n’est pas mis en lumière, le mal poursuit son œuvre en nous, il pourrit, il nous fait souffrir et nous enferme. Cela
se passe parfois à notre insu, tant il est vrai que la plupart de nos fautes
nous sont cachées. Tel Mowgli hypnotisé par le serpent dans le Livre de la jungle, nous sommes pris
dans les anneaux du mal qui se resserrent sur nous et nous ne nous en
apercevons pas toujours. La vérité vous
rendra libres. Les liens étouffants de ces ténèbres ne peuvent être
détruits que par la vérité que le Seigneur vient faire en nous et qui soumet le
serpent.
C’est
ce qui se passe quand nous confessons nos péchés. Si le Seigneur a donné à ses
apôtres et aux prêtres qui leur succèdent le pouvoir de remettre les péchés,
c’est pour que nous puissions être libérés. L’histoire du serpent d’airain en
est emblématique. La morsure des serpents brûle les Hébreux, leur venin fait
son œuvre en leurs veines et ils risquent la mort. Sur l’ordre divin, Moïse fait
un serpent d’airain et le place au sommet d’un mât. Quand quelqu’un est mordu
par un serpent, il regarde le serpent d’airain et il est guéri de son mal. Cela
peut sembler paradoxal mais correspond pourtant à la manière même dont Dieu
nous délivre de tout mal : regarder en face notre péché, c’est la seule
manière dont nous puissions en être purifiés ; mais, pour que ce regard
tourné vers le mal ne devienne pas une nouvelle complicité avec lui, pour qu’il
puisse effectivement nous en délivrer, encore faut-il que nous le faisions avec
l’aide de Dieu. En effet, si nous l’affrontons seuls, nous risquons d’être séduits comme Adam et Ève ou étouffés comme Mowgli. En venant auprès d’un prêtre pour
que soit faite cette lumière dans nos vies, nous affrontons le regard du
serpent sans risquer d’y plonger, nous nous armons de la lumière divine devant
laquelle la vermine maléfique fuit, comme détale Arachne devant la lumière
d’Eärendil portée au fond de la grotte ténébreuse du Seigneur des anneaux.
Nous
pouvons croire que nos ténèbres sont trop noires et ne pas oser les affronter.
Pourtant, depuis que le Christ est descendu dans la nuit de la mort, il n’est rien
qui soit trop loin de lui si nous le laissons y entrer. La confession ne consiste
pas à vaincre par soi-même un nuit trop épaisse mais à laisser à Dieu les clefs
de notre vie, à laisser sa lumière venir en nous et nous soigner. Avec lui,
nous allons regarder notre mal sans nous y complaire, nous allons le regarder
une bonne fois pour toutes, bien en face, et le voir brûler par le soleil
éclatant de sa miséricorde. Il n’est pas toujours simple de s’abandonner
effectivement entre les mains de Dieu, nous voulons avouer et les mots nous
échappent, nous ne savons pas quoi dire, nous ne savons pas comment le dire. Le
prêtre est là pour nous y aider. Nous pouvons aussi nous y préparer en priant
l’Esprit Saint pour qu’il nous éclaire et nous donne de livrer le fond de notre
cœur, d’avouer notre mal avec vérité. Si
nous nous remettons entre les mains de l’Esprit Saint, si nous prenons le temps
de méditer en demandant au Seigneur sa lumière sur notre vie, si nous allons
nous confesser en nous confiant au Seigneur en tout point, nous serons parfois
surpris de dire les choses d’une manière nouvelle qui nous instruira sur
nous-mêmes. Le Seigneur n’est pas simplement du côté du prêtre qui pardonne, il
est déjà en notre cœur qui désire le pardon et reçoit la lumière de la vérité
libératrice. Amen.
Saint-Michel – 15 mars 2015