SAINT HIPPOLYTE – 18 AVRIL 2014
VENDREDI SAINT
Il portait le péché des multitudes
Nous avons cru un jour que nous serions sauvés par notre seule volonté de suivre le Christ mais nous avons bientôt découvert qu’il ne suffisait pas de vouloir pour pouvoir. La toute-puissance de notre volonté fut rapidement mise à bas par l’expérience : l’expérience c’est ce défaut que nous avons essayé de combattre et qui nous colle tellement à la peau qu’il semble qu’il faudrait nous arracher notre propre personne pour le faire disparaître ; c’est cette habitude mauvaise dont nous voulons nous débarrasser et qui revient pourtant dans les moments où nous avions cru qu’elle était définitivement derrière nous ; c’est cette relation difficile en famille ou au travail dont nous voulons croire qu’elle peut être meilleure, où nous mettons toutes nos forces à aimer sans que cela ne semble porter de fruit en nous ou dans l’autre.
Chaque fois, nous découvrons un peu plus la prison étrange dans laquelle nous sommes. C’est bien notre volonté qui nous y retient car aucun péché ne se produit sans que nous le voulions, c’est donc de notre plein gré que nous nous enfermons dans cette geôle dont nous avons les clefs et pourtant, quand nous essayons d’en sortir, la serrure est grippée, la clef entre mal, la porte ne s’ouvre pas. Ce qui est théoriquement si simple : choisir d’arrêter de pécher, apparaît alors concrètement impossible. Tout semble dépendre de notre libre choix, mais au moment de nous servir de notre liberté pour choisir de faire le bien, nous nous apercevons de notre malheur : c’est la liberté même qui a été atteinte par notre lèpre, ankylosée, paralysée, elle n’est plus à même de remplir son office. Nous voulons courir hors de la maison en feu mais nous nous apercevons que nos jambes sont atteintes par l’incendie et ne peuvent plus nous porter.
Qui donc ouvrira le cercle infernal dans lequel nous sommes enfermés ? Qui brisera le charme qui nous attache à notre mal alors que nous cherchons à le fuir ?
Nous avons cru que Dieu le pourrait. Nous avons crié vers lui, nous nous sommes frappé la poitrine, nous avons avoué nos péchés. Nous espérions des explications ou un miracle mais le ciel restait fermé. Rien. Silence. Nuit. Mon Dieu, mon Dieu pourquoi m’as-tu abandonné. Nous sommes descendus à ce point du désespoir le plus bas, le plus noir. Dans les ténèbres, nous nous sommes tenus n’ayant plus personne vers qui nous tourner. N’ayant même pas la consolation de réussir à pleurer, nous avons perdu l’espérance, nous n’avons plus cru en la lumière, nous avons parfois même insulté le Seigneur et son ciel. Où étais-tu Seigneur lorsque je souffrais ?
Aujourd’hui, sans dire un mot, Jésus s’approche. Sur cette croix, c’est notre prison, c’est notre désespoir, c’est le moment le plus noir de notre vie que Jésus vient vivre, pour nous y rejoindre, prononcer notre nom, nous prendre dans ses bras et nous donner sa liberté. Amen.