6 octobre 2013 – Saint Hippolyte
XXVIIe DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE – ANNÉE C
Quel est le rapport entre les deux parties de l’évangile de ce dimanche ? Les apôtres demandent au Christ d’augmenter en eux la foi et il leur répond par une affirmation et par une parabole. L’affirmation c’est que si nous avions la foi grosse comme un grain de moutarde nous dirions à un arbre de se déraciner et d’aller se planter dans la mer et qu’il le ferait. La parabole qui suit ne semble pas avoir de rapport direct avec la demande des apôtres : il s’agit du service d’un maître.
Or, je crois que pour bien saisir la réponse de Jésus, il faut se rendre compte que les deux parties de sa réponse se comprennent ensemble. En effet, cette histoire d’arbre qui va se planter dans la mer pourrait être interprétée comme un pouvoir magique, la foi ne serait alors qu’une énergie ésotérique qui permettrait d’accomplir des choses extraordinaires. Ce n’est pas de cela qu’il s’agit !
L’autre partie de la réponse prise à part pourrait aussi nous induire en erreur : la foi ce serait d’accomplir notre devoir de chrétien. Avoir la foi, serait venir à la messe le dimanche, servir les pauvres, donner au denier, etc. Et la foi ce n’est pas cela non plus !
Certes, la foi nous fait accomplir des choses dont nous ne nous pensions pas capables, certes elle nous entraîne à nous mettre au service de Dieu, mais si elle permet ces choses extraordinaires et si elle nous met au service, c’est parce qu’elle est l’entrée dans une relation.
Nous venons au Seigneur en lui demandant comme les apôtres : augmente en nous la foi parce que nous voulons croire mieux et davantage, parce que nous voulons accomplir de plus grandes choses, parce que nous voudrions mieux faire notre devoir.
Et que nous répond-il ? Si vous voulez que la foi augmente en vous, écoutez la parole du maître qui vous dit à votre retour des champs : mets-toi en tenue pour me servir. Grandir dans la foi, c’est grandir dans la relation à Dieu qui est Maître et Seigneur, c’est entrer à son service de manière plus résolue. C’est finalement entrer dans la relation d’obéissance filiale que Jésus entretient avec son Père.
Les personnages de la parabole – le maître et le serviteur – doivent évoquer pour nous la figure du Père très-aimant et la figure du Fils très obéissant, la relation de service dans laquelle Jésus nous invite à entrer, c’est donc la relation du Père et du Fils au sein même de la Trinité. Le premier serviteur, celui qui est descendu si bas que personne ne pourra lui ravir cette dernière place, celui qui s’est fait le serviteur même de ses disciples en leur lavant les pieds, c’est le Fils. Lorsqu’il nous dit de nous mettre au service, il nous demande d’entrer à sa suite.
Dans ce contexte, le devoir dont les serviteurs disent à la fin : nous sommes des serviteurs quelconques : nous n’avons fait que notre devoir n’est donc pas une liste de choses à accomplir mais le type de relation que nous entretenons avec Dieu lui-même : une relation filiale. Le devoir, c’est avant tout ce que nous devons, la dette que nous avons vis-à-vis de celui qui nous a créés et rachetés. Attention ! Car, sur cette terre les créanciers peuvent être des tyrans, le Seigneur, lui, ne réclame pas la dette, il ne désire que nous accueillir, et cela pour pouvoir effacer notre dette; encore faut-il que nous acceptions de recevoir de lui, d’entrer dans cette relation du Fils qui se reçoit tout entier de son Père.
Tel est l’enjeu de notre foi. Croire en Dieu, c’est avant tout recevoir toute chose de lui et le louer pour ce que nous recevons de lui, c’est laisser notre vie toute entière être envahie par une immense action de grâce pour ce que nous recevons de lui et lui offrir en retour tout ce qu’il nous a donné. Si nous voulons qu’augmente en nous la foi, il faut le laisser envahir notre vie. Ne rentrons pas de la messe comme le serviteur rentre des champs et croit que son service est accompli, notre service c’est notre vie entière. Nous pouvons à tout instant revenir à Dieu au fond de notre cœur et quelle que soit notre activité, lui dire pour un instant notre amour et notre offrande, lui présenter nos prières et nos louanges.
C’est ainsi que grandira en nous la foi et qu’en nous le Seigneur accomplira des merveilles. Des arbres que l’on croyait indéracinables seront transplantés, des montagnes que l’on pensait inamovibles seront déplacées. Amen.